Le rôle renouvelé des livres d’art dans la carrière des artistes

Les catalogues et monographies ont toujours joué un rôle important dans la carrière des artistes. Mais l’époque actuelle, marquée par l’essor des nouveaux médias et de la communication rapide, a profondément transformé la manière dont elles accompagnent les artistes dans leur parcours¹.

Comme l’explique Éric de Chassey, directeur de l’INHA, aujourd’hui “le travail monographique est lié à la promotion de l’artiste (…) à l’activité d’un milieu culturel et marchand, au moins autant qu’à des soucis scientifiques.”²

L’enjeu de la visibilité à l’ère numérique

Le défi des réseaux sociaux
Les réseaux sociaux, malgré leur capacité à capter l’attention du public, génèrent principalement des interactions éphémères. Ces rencontres virtuelles se transforment rarement en relations durables ou en acquisitions d’œuvres.

L’importance croissante du format papier
Dans cet environnement digital saturé, le support papier gagne paradoxalement en importance. L’enjeu principal est désormais de réussir à se démarquer du flux continu d’informations, pour construire un réseau solide et durable qui pourra générer de nouvelles opportunités professionnelles.

Une stratégie de légitimation

Une publication plus précoce
Les monographies, autrefois réservées aux artistes confirmés, sont maintenant publiées dès que le travail atteint une certaine maturité. Elles évoluent pour devenir à la fois un outil de démarcation et un véritable ambassadeur de l’artiste, servant de support de communication durable.

Un outil qui crédibilise le travail de l’artiste
Un artiste est souvent confronté à la nécessité de présenter son travail, que ce soit lors de rencontres avec un galeriste, pour un concours, devant un jury, etc. Ces rencontres sont ce qui fait évoluer sa carrière. La monographie devient alors un outil de référence professionnel. Elle concentre l’ensemble des informations utiles et donne une vision à la fois globale et détaillée de son travail.

Un support de relation précieux
Le livre d’art s’impose comme un élément essentiel dans la relation avec les collectionneurs. Souvent offert lors de l’achat d’une œuvre ou pour concrétiser un nouveau contact, il permet d’entretenir un lien privilégié tout en facilitant le bouche-à-oreille, contribuant ainsi à augmenter la visibilité de l’artiste dans son réseau.

Une structure claire et complète
Habituellement composée du trio texte critique / corpus d’œuvres / biographie, la monographie donne une vision d’ensemble du parcours de l’artiste et légitime son travail. Elle donne des clés de compréhension et dévoile la cohérence d’un travail.

L’évolution du processus de publication

Une plus grande implication des artistes
Les monographies jouant un rôle pivot dans le parcours des artistes, ces derniers prennent désormais une part active dans la publication de leurs monographies, supervisant souvent directement le projet. Comme l’a observé Éric de Chassey “ce sont parfois les artistes eux-mêmes qui en assurent la supervision ou qui choisissent la personne qui va porter leur « récit autorisé »”³.

Des budgets plus accessibles
Les avancées technologiques en matière d’impression ont considérablement transformé le paysage éditorial. Tout en maintenant une qualité « muséale » essentielle, les coûts de production sont devenus plus accessibles, ouvrant la voie à des budgets plus raisonnables et des possibilités de financements variées.

Quelques exemples de budget :

Ainsi les éditeurs ont-ils élargi leur champ d’action pour proposer un accompagnement plus complet auprès des artistes. Ils peuvent intervenir notamment dans la recherche de financements, la sélection des intervenants ou la mise en place d’événements promotionnels, contribuant ainsi au développement de la carrière des artistes.

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[1]: Voir à ce sujet le dossier spécial de l’Institut national d’histoire de l’art (INHA) “Comment la monographie d’artiste, genre fondateur de l’histoire de l’art, a-t-elle su s’adapter à l’éclatement du concept d’œuvre et à la crise de la notion d’auteur ?” in Perspective n°4

[2]: Sylvie Aubenas, Eric de Chassey, Michel Laclotte, Nabila Oulebsir, Philippe Plagnieux et Agnès Rouveret, « La monographie d’artiste : une contrainte, un modèle, un schéma adaptable ? », Perspective [En ligne], 4 | 2006, mis en ligne le 31 mars 2018, consulté le 20 septembre 2023. URL : http://journals.openedition.org/perspective/10437 ; DOI : https://doi.org/10.4000/perspective.10437

[3]: Ibid