Les éditions Lelivredart publient Josette Rispal et Chomo, une amitié singulière, un ouvrage qui révèle, quarante ans après leur première rencontre, les archives inédites d’une relation artistique hors norme entre la sculptrice parisienne et l’ermite de la forêt de Fontainebleau.

En juillet 1984, Josette Rispal franchit les barricades du Village d’Art Préludien à Achères-la-Forêt. Chomo, 77 ans, l’accueille d’un « C’est de la merde ! ». Cette apostrophe inaugure pourtant sept années de visites régulières, de correspondances et d’un mécénat sans contrepartie. Le livre rassemble pour la première fois ces témoignages : lettres manuscrites, photographies, listes de courses griffonnées par l’artiste reclus.

Un mécénat sans calcul

Pour financer le film de Clovis Prévost sur Chomo, Le Débarquement spirituel – Images de lumière, Josette Rispal vend son mobilier Art nouveau. En janvier 1991, elle organise sans subvention une exposition dans sept lieux de Milly-la-Forêt. Des milliers de visiteurs découvrent l’œuvre de celui que l’on surnommait « le fou de la forêt ». Cette générosité n’attend rien en retour. Chomo propose de tout lui donner. Elle refuse. 

Des correspondances révélées

Le livre exhume une correspondance restée inédite. Sur les enveloppes, Chomo inscrit « Josette Rispal, Créatrice du Futur ». Dans ses lettres, il l’appelle « ma petite sœur ». Un courrier de février 1989 destinée à son amie la décrit comme une « Petite sœur, descendue d’un nuage de rêve » et précise : « Josette et Hugues restent très près de nous deux et ils t’adorent. C’est la seule famille qui me reste. »

Ces archives documentent aussi le quotidien : Rispal fait les courses pour Chomo, qui lui transmet des listes détaillées. Elle le visite jusqu’à trois fois par semaine, plus d’une centaine de fois au total.

Deux parcours opposés, une même pratique

Chomo, né Roger Chomeaux en 1907, a étudié aux Beaux-Arts avant de tout abandonner pour bâtir son ermitage en forêt de Fontainebleau. Il revendique de « guérir par le refus de la connaissance ». Josette Rispal, née en 1946 à Aurillac, est autodidacte. Elle modèle sa première sculpture à vingt-huit ans, L’Homme qui se roule de douleur, mais fouillait les rebuts dès l’enfance pour collecter objets et matériaux à transformer en œuvre d’art.

L’un rejette son savoir académique, l’autre construit sans lui. Tous deux transforment les reliquats de notre époque en œuvres. En octobre 1987, Rispal expose à la salle Pleyel « Nous irons au bois… », accompagnée d’un Manifeste écologique affirmant que « l’artiste aussi bien que l’homme lui-même sont MORTS s’ils persistent à tourner le dos à la nature et à ses secrets ».

Le Christ sauvé

Lors de l’exposition de Milly-la-Forêt, Rispal convainc le prêtre d’accueillir dans l’église Notre-Dame-de-Milly une sculpture monumentale en fer de Chomo, Le Christ, qui s’y trouve toujours. Pour la circonstance elle fait venir Chomo dans son propre atelier pour le persuader.

Josette Rispal est sculptrice. Installée à Paris depuis les années 1970, elle travaille le bronze, le verre, les matériaux de récupération. Dès 1976, elle s’intéresse à l’holographie et réalise Alpha ou l’homme libre, sculpture intégrant un hologramme, avec le fondeur Susse.