Patrick Dupuis – Etat des songes

Mot de l’éditeur :

« Mon ami Marc m’a dit de prendre une feuille et un crayon, de parcourir les rues de la ville pendant un temps donné, d’observer attentivement la vie autour de moi et de noter tous les flashs qui m’arrivaient. » Cette méthode, que Patrick Dupuis applique depuis des décennies, transforme l’errance urbaine en acte créateur. Là où d’autres ne voient que le quotidien, l’artiste capte des éclats de beauté fugace qu’il transmue en « visions » poétiques. Dans les pages qui suivent, nous découvrons un artiste-passeur qui navigue entre le réel observé et l’imaginaire rêvé, créant ce qu’il nomme justement un État des songes.

Dupuis construit une géographie intime où se superposent les lieux et les époques. Les corons de son enfance nordiste, avec leurs « ornières emplies d’eau charbonneuse » et le « doux parfum des lilas un dimanche de printemps », dialoguent avec les menhirs bretons où il décèle des présences humaines dans les ombres. Ses voyages, de l’Arctique à la Polynésie, enrichissent cette cartographie personnelle sans jamais effacer la mémoire première. Mais cette géographie n’est pas que nostalgique : elle embrasse aussi les fractures du présent, des Gilets jaunes à la pandémie, des « zombis » du consumérisme aux « flics de la pensée ». L’artiste observe avec acuité ce qu’il nomme « l’hégémonie culturelle des bien-pensants », opposant à la laideur ambiante ses visions de beauté résistante.

Face à ce monde désenchanté, l’artiste oppose la beauté pure du corps féminin. Ses nus au trait épuré – Songeuse, Lointaine, La Pudique – poursuivent un dialogue avec Matisse et Modigliani sans nostalgie passéiste. Ces femmes dessinées deviennent des muses contemporaines, depuis les prostituées de la rue de la Clef jusqu’aux baigneuses méditerranéennes. « Pour que la Beauté apparaisse dans toute sa clarté », écrit-il, révélant son projet esthétique de résistance politique autant que poétique.

Cette publication dévoile surtout une poétique du fragment où texte et image convergent. Les aphorismes côtoient les récits autobiographiques romancés, les méditations sur l’art alternent avec les scènes de rue. Dupuis écrit comme il dessine : en croquis rapides qui « dégagent l’essentiel ». Un art de la concision qui n’exclut ni la profondeur ni l’émotion, offrant au lecteur les clés d’une œuvre où, selon les mots de l’artiste, « de l’observation à l’interprétation, de la réalité à l’imaginaire », tout devient matière à transfiguration.

24 x 30 cm
48 pages en couleurs
Couverture souple à rabats
isbn 978-2-35532-457-4
24 €